America 2014 - Walnut Canyon
Douze kilomètres à l'est de Flagstaff, en Arizona, à plus de 2100 mètres d'altitude, s'est creusé le Walnut Canyon, profond de 120 mètres. Les parois de grès du canyon sont les dunes d'un ancien désert sculptées par le vent. Dans le canyon supérieur, des fossiles marins incrustés attestent la présence d'une mer plus récente.
Bien plus tard, entre 600 et 1400 de notre ère, le peuple qui habitait cette région est appelé Sinagua par les archéologues. Dérivé de deux mots espagnols, sin=sans et agua=eau, ce nom signifie que ces indiens vivaient sur des terres arides et exploitaient au mieux ces terrains rocheux où l'eau est rare. Ils vivaient de chasse, de cueillette et pratiquaient une agriculture sèche, pratiquement sans eau. Ils dégageaient de petites clairières dans la forêt qui recouvre encore le plateau autour de Walnut Canyon, aménageaient de petites restanques, avec des murs de soutènement tout autour des champs, pour retenir la terre et l'empêcher de s'échapper. Ils cultivaient deux sortes de maïs, des courges, des haricots tépari et des haricots rouges. Ils ramassaient aussi des amarantes, qu'ils mangeaient comme des épinards, ainsi que des glands et des pignons de pin qu'ils faisaient griller. Le gibier (cerfs, mouflons, chiens de prairie, lapins, dindons) était consommé rôti ou bouilli.
Vers 1150, une éruption volcanique survient non loin de ce qui est aujourd'hui Flagstaff. Les habitants perdent leurs maisons et les terres qu'ils avaient cultivées depuis plus de 400 ans. Les déplacements de population qui s'ensuivent modifient l'occupation de l'espace : des zones faiblement peuplées comme Walnut Canyon et Wupatki connaissent alors et pour plusieurs décennies, une forte densité de population, regroupée en villages au lieu des hameaux isolés qui avaient précédé. Ce bouleversement entraîne d'autres évolutions : complexité de l'organisation sociale, commerce, ouverture sur les autres communautés, développement de la spiritualité. Quand vers 1250, les Sinaguas quittent définitivement Walnut Canyon, bien des explications furent avancées : sécheresse, famine, climat plus froid, maladie, guerres et désastres naturels. Mais du point de vue des Hopis, le vrai motif de cette migration, de ce regroupement en gros villages est religieux : selon la tradition Hopi, Walnut Canyon n'était simplement qu'une étape dans la réalisation d'une alliance spirituelle.
Sur le haut du plateau, les Sinaguas ont laissé les traces de maisons de pierre et de bois : on peut en voir encore les fondations et leurs soubassements. Une partie d'entre eux, entre 1100 et 1250, descendirent dans ce canyon pour y construire leurs habitations dans les alcôves peu profondes de ces parois calcaires. Cette communauté, celle du fond du canyon, ne comporta jamais plus d'une centaine d'individus. Les parois abruptes de Walnut Canyon favorisent l'aménagement des habitations sous les replis de la roche, tout en permettant de contrôler les accès et de garantir la sécurité. Les rebords horizontaux servent de sentier pour relier les habitations, mais les habitants des falaises en construisent d'autres, en lacets pour relier le rebord du plateau au fond du canyon. Les rebords en surplomb abritent les habitants des éléments : neige, pluie ou soleil. Les murs de pierre et de boue les isolent du vent glacial de l'hiver. Les portes sont petites et recouvertes de peaux d'animaux, de nattes, de tissus de coton ou de brindilles tissées. L'air entre par dessous la porte, passe près du foyer central et ressort par un trou au-dessus de la porte, entraînant presque toute la fumée.
L'eau coulait de façon intermittente dans le canyon, mais des réserves se formaient dans des bassins naturels et la fonte des neiges au printemps complétait l'approvisionnement sur l'année. L'eau du canyon est aujourd'hui canalisée pour l'alimentation de Flagstaff.
Depuis 1915, le Walnut Canyon est préservé en tant que National Monument. Pour voir de près les quelques 25 habitations aménagées dans les replis de la falaise, un sentier goudronné a été réalisé. Ainsi que des escaliers, car il faut descendre pour tout visiter, 200 marches, 56 mètres de dénivelé. Prévoir l'eau, de bonnes chaussures et du souffle pour la remontée, car l'on n'est pas toujours accoutumé à un tel effort à cette altitude ! Nous avons eu du soleil, mais il faisait 2°C ce 7 mai ... De retour au sommet, une petite boucle de 2 km plats permet de beaux points de vues plongeants sur le canyon ainsi que la visite de quelques traces commentées des habitats du haut du plateau.
Sources : National Park Service et panneaux d'informations sur le site.